La Glass House a été construite comme sa propre résidence par Philip Johnson à New Canaan, dans le Connecticut, en 1949, comme un hommage et une interprétation de la Farnsworth House, que le grand architecte allemand Mies van Der Rohe avait construite quelques années auparavant non loin de Chicago.

« Une cage de singes pour un seul singe », fut le commentaire méprisant du jamais tendre Frank Lloyd Wright, qui avait une aversion personnelle pour Johnson, tandis que, de leur côté, tous les théoriciens et critiques de l’époque se consacraient à une analyse plus approfondie de l’œuvre pour démontrer qu’elle n’était en fait qu’un plagiat du maître allemand.

La réalité est tout autre, à commencer par ce que l’auteur a compté parmi ses sources d’inspiration : outre Mies, Le Corbusier, l’Acropole d’Athènes, le casino du parc Glonicke de Schinkel de 1830 et le tableau de Malevič de 1915 « Carré noir sur fond blanc », qui illustrent parfaitement le syncrétisme historiciste de Johnson.

Il écrit lui-même : « Le conflit entre le belvédère et le palais de justice a été définitivement résolu en considérant l’ensemble du promontoire comme un palais de justice sur une mini-acropole, dans laquelle les arbres autour de la maison représentent les limites perceptives du terrain. »

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Le bâtiment principal est un rectangle de plain-pied d’environ dix mètres sur dix-huit, constitué d’une cage en acier fermée par du verre et reposant sur une base en briques. Chaque élévation a une symétrie biaxiale et les côtés opposés sont égaux. L’intérieur, quant à lui, présente une division asymétrique de l’espace, obtenue grâce à des placards de différentes hauteurs et à la salle de bains cylindrique. Celui-ci, réalisé dans les mêmes briques que le socle d’où il semble émerger, est l’élément central de la maison, une sorte d’ancre, de point fixe. La cuisine est réduite à un simple comptoir afin de ne pas encombrer l’espace.

La maison proprement dite est accompagnée de l’annexe, qui contient une chambre d’amis et une autre pour les domestiques. Elle est construite avec les mêmes briques que la Glass House, mais contrairement à cette dernière, elle présente une structure tectonique et compacte : sur l’élévation ouest, le rideau de briques n’est interrompu que par la porte d’entrée, sur l’élévation est par les trois fenêtres circulaires.

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L’arrangement entre ces deux bâtiments, un petit bassin et une statue n’est ni causal ni académique.  Un chemin de gravier relie les deux maisons au parking en ligne droite et sans tenir compte de leur axialité : l’approche de l’ensemble de la composition découle directement de la conception grecque, qui favorisait la perception des monuments sous un angle oblique et les disposait de manière à ce qu’un seul à la fois domine le champ de vision sous cet angle donné.

En effet, dès le début du chemin menant aux maisons, on aperçoit d’abord le corps de l’annexe, tandis que la Glass House n’apparaît en vue sous un angle oblique qu’après avoir contourné le pin à l’angle du promontoire.

Cet intérêt pour la verdure et le paysage, qui trouve son antécédent dans le « pittoresque » du jardin anglais, est une preuve supplémentaire que Johnson ne s’est pas contenté de plagier la maison Farnsworth de Mies van der Rohe, qui tendait à faire du paysage une simple toile de fond pour les bâtiments, en le modifiant légèrement.

La récupération de diverses traditions architecturales sous la bannière d’un historicisme marqué, interprété toutefois dans une tonalité moderne, et l’utilisation du paysage comme sujet actif dans la réalisation de l’ensemble du projet font de la Glass House, de l’avis unanime de Philip Johnson, le chef-d’œuvre de cette phase, qui la considère comme « une œuvre d’art qui découle de la capacité de synthétiser de nombreuses sensibilités différentes en même temps ».